Cours Numériques Culture

Laurence Aventin Mai 2022

Artemisia Gentileschi, une femme peintre dans l'Italie du XVIIe siècle

Première femme peintre à part entière, Artemisia Gentileschi est une figure romanesque. Après le scandale de son viol par un ami de son père, elle a su conquérir une liberté qui lui a permis de mener une véritable carrière d’artiste. Le Musée Maillol à Paris lui consacre une exposition qui révèle son talent. Jusqu’au 15 juillet 2012.Artemisia Gentileschi est née en 1593. Elle est la fille aînée d’Orazio Gentileschi, un des plus grands peintres de la Rome baroque et proche du Caravage. Elle a sans doute appris la peinture dès son plus jeune âge dans l’atelier de son père. En 1610, elle a 17 ans, Artemisia signe sa première œuvre autonome, une « Suzanne et les vieillards ». "Son père l'a sans doute peinte avec elle mais a laissé sa fille signer pour lancer sa carrière", estime Francesco Salinas, commissaire de l’exposition. Quelques mois plus tard, la jeune fille est violée par un collaborateur de son père, le peintre Agostino Tassi. Ils auraient eu une relation pendant plusieurs mois, le peintre promettant de l’épouser pour sauver son honneur. Mais Tassi est déjà marié et Orazio Gentileschi le dénonce. Un procès s’ensuit, particulièrement pénible pour la jeune peintre. Il dure sept mois et le scandale affecte sa réputation, même si son violeur est condamné aux galères.

 Une femme libre
La situation d’Artemisia est inédite dans l’Italie de l’époque. Une femme est mineure à vie, dépendant forcément d’un père ou d’un époux. Elle ne peut pas signer un contrat, toucher un paiement sans la garantie d’un tuteur. Elle ne peut pas voyager seule. Et pour figurer sur la liste des salariés du Grand duc de Toscane, elle doit être mariée avec un homme qui exerce la même profession qu’elle. Selon Alexandra Lapierre, qui a écrit une biographie romancée, « Artemisia » (Editions Robert Laffont), c’est pour cette raison que son père la marie dès la fin de l’année 1612 à un de ses assistants, un « peintre médiocre ». En tout cas, Pierantonio Stiattesi la laissera exercer son art en toute liberté.Le couple quittre très vite Rome pour Florence et c’est là que vient la reconnaissance. Artemisia travaille pour les Médicis et réussit à s’inscrire à l’Académie du dessin de la capitale toscane, un exploit inédit pour une femme.

Elle peint des nus, œuvres osées pour l’époque, qu’on cache derrière un rideau. Elle prend sans doute pour modèle son propre corps, dont elle observe le reflet dans un miroir. Elle se peint d’ailleurs souvent elle-même, on reconnaît ses traits dans de nombreuses toiles.